Les jeunes artistes de Tonga

Les jeunes artistes de Tonga

Connaissez-vous Tonga ? Ou plutôt le Royaume de Tonga. C’est un Etat de Polynésie, dans l’océan Pacifique, à 744 km à l’est-sud-est des îles Fidji et à 875 km au sud de Wallis-et-Futuna, comportant plus de 170 îles et îlots. Il s’en passe des choses à Tonga – moi-même je n’en saurais rien si je n’avais pas une amie du nom de Virginie qui réside là-bas depuis quelques années déjà, je la suis sur les réseaux sociaux et vois un peu ce qu’il s’y passe et notamment ce qu’il s’y est passé en février dernier, quand un cyclone de catégorie 5 a semé la destruction. Elle a d’ailleurs besoin de votre soutien, je vous laisse lire et découvrir son histoire.

 

 

“Cela fait 5 ans que j’habite à Tonga et que je DETESTE être fourrée dans la case “expatriés”, avec des gens qui n’essaient surtout pas de s’intégrer, tout juste de s’intéresser à la culture locale dans la mesure de ce qui leur semble bénéfique pour leur travail, qui restent entre eux dans une bulle où se mélangent toutes nationalités, sauf la locale.

Il y a une marge énorme entre vivre à l’étranger dans un pays développé à égalité ou à peu près avec le sien (ce que j’ai fait par le passé), et vivre dans un pays considéré par les dénommés expats comme pauvre et arriéré. Surtout un qui ressemble au paradis avec lagon et tout le tralala, où la devise nationale est « Dieu et Tonga sont mon héritage », ce qui n’a pas l’air de leur donner davantage d’indice sur le fait que ce n’est pas le pays le plus « sea, sex and love » qui soit.

Mes rares amis étrangers ont ma mentalité, sinon nous n’aurions rien à faire ensemble.

 

Je suis une immigrée ici, et même des Tongiens trouvent ça étrange que je reste, bien qu’ils sachent pertinemment que je suis parfaitement intégrée. Pas assimilée mais intégrée.

 

Selekā, une initiative locale pour la jeunesse et les arts, c’est là où je me sens le plus à ma place : sur le côté, puisque je ne suis pas une jeune Tongienne éprise de travail pour la communauté ou la pratique artistique, mais complètement dedans puisque je fais partie du ciment du groupe depuis près de 5 ans maintenant et j’ai tissé des liens forts avec le groupe entier et certains membres en particulier. J’en parle longuement dans un article de mon blog qui est mis en lien sur la page de la récolte de fonds.

 

Ce n’est en aucun cas mon association, mais j’en fais partie à part entière. Et en tant qu’adulte avec un minimum de qualités rédactionnelles et organisationnelles, j’en suis devenue un “cadre” au sens propre : j’encadre l’évolution à l’étranger du groupe, et en particulier des artistes et de leur représentation au-delà de l’océan. Les jeunes du groupe, qui sont l’immense majorité des membres, sont … jeunes. Ils sont contents de participer à tout ce qu’on leur propose, cependant ils n’organisent rien d’eux-mêmes. Ces événements que nous organisons sont importants puisqu’ils soudent ce groupe communautaire et les aident à se développer.

 

Pour tout ce qui se passe à Tonga, je n’ai pas grand mot à dire. Ils sont tongiens et savent bien mieux que moi comment ça se passe ici et ont leur cousin, leur tante ou encore le chef d’un grand-oncle qui leur demande ceci-cela et en un rien, tout se fait. A l’étranger en revanche, les règles tongiennes ne s’appliquent pas et donc je me débrouille bien mieux qu’eux, en particulier avec les personnes qui ne sont pas originaires des îles, et c’est là que j’interviens.

 

Cela ne veut pas dire que je ne suis pas bien intégrée – au contraire, cela montre que je connais mes limites et celles que je n’ai aucune bonne raison de dépasser.

Et je suis de plus à plus à l’aise avec les autres Polynésiens et Océaniens, et même si chaque pays et même chaque île peut être extrêmement différent, j’ai appris au fur et à mesure de mes rencontres à discerner ce pot commun culturel, bien qu’il faille vraiment bien connaître la région pour constater ces différences.

 

Aider à reconstruire le “centre d’accueil ” – c’est un ami Alsacien qui l’a appelé ainsi quand il a partagé mon statut sur Facebook, au début cela me faisait rire, et puis finalement, je trouve cette dénomination intéressante, bien qu’elle gomme entièrement le côté artistique original, mais met en avant le côté social – ou plutôt le studio de Selekā, ce n’est pas m’aider moi, c’est aider à reconstruire la seule initiative tongienne pour la jeunesse qui ne soit pas affiliée à une église, où les jeunes sont libres d’être eux-mêmes et de s’améliorer en se fréquentant entre-eux (même si au départ, ils ne sont pas nécessairement tous réputés fréquentables). Ce cercle vertueux consiste assez simplement à leur donner la parole pour exprimer leurs histoires, leurs émotions, leurs goûts musicaux alternatifs, à travers tout un tas de médias créatifs, sans jamais les juger, et en leur permettant de contribuer positivement à la société, qui souvent les rejette pour des raisons culturelles, à travers des projets d’intérêt général. Ces jeunes surpassent ce sentiment d’exclusion, mieux encore, ils sont acceptés et se sentent valorisés.

 

Dernièrement, un putain de cyclone de catégorie 5 a donc détruit le seul endroit du pays où des jeunes, souvent déscolarisés, parfois en rupture familiale, avaient l’habitude de se retrouver entre eux. C’est là qu’ils se retrouvent, sous la coupe d’un artiste, la figure paternelle, qui discrètement les oriente dans la vie, petit à petit, leur apprend à peindre et dessiner, et les guide dans d’autres pratiques créatives, et qui est toujours là pour eux.

En bonus, en pour les plus courageux, ils ont une Française avec qui pratiquer leur anglais, avec certains cela va très vite, avec d’autres cela prend des mois, voire des années ! Et surtout une personne qui est à leur écoute, qui leur amène des films et de la musique plus ou moins bizarres, que généralement ils kiffent, qui leur fout des coups de pied au cul quand c’est mérité, et qui les encourage quand ils ont besoin d’affirmation.

 

Je vois des histoires ahurissantes où des jeunes font des trucs horribles, par exemple récemment deux adolescents ont tabassé une commercante chinoise de 61 ans pour lui voler des cigarettes et autres babioles, et je suis folle de rage pour plein de raisons faciles à deviner, et aussi gonflée d’espoir car je sais que même si beaucoup de gamins à Selekā ont exactement le même profil que ces petites merdes, JAMAIS ils ne feraient rien d’aussi barbare, parce que nous leur inculquons des valeurs en leur donnant simplement une place à eux.

 

Il y a des problèmes avec la jeunesse partout sur terre, or on s’aperçoit que là où l’encadrement est non répressif et non restrictif (je ne parle pas de l’école), il y en a moins.

 

C’est ça, la mission de Selekā, grâce à la promotion de l’art contemporain par la pratique.

 

Personne ne fait de longs discours sur l’art, l’histoire de l’art, les diverses traditions, pas de blabla ! Nous faisons de l’art, et qui veut vient faire de l’art. Même si au fond certains n’ont aucune intention d’être artiste, ils ont juste besoin de s’exprimer. Dans un pays où il y a peu de place pour l’expression des jeunes, et encore moins d’expression libérée, c’est magique.

 

J’en viens donc à la (re)quête énoncée plus tôt. Amis francophones, je tiens à Selekā comme à la prunelle de mes yeux, car c’est un groupe qui fait un travail admirable pour aider des jeunes en difficulté sociale à se trouver une place dans la communauté, et ce tout en étant eux-mêmes, à travers l’art, l’expression créative libre et le service à autrui. L’immense majorité d’entre vous n’est jamais venu à Tonga, donc vous allez devoir me croire sur parole quand je dis que Tonga a besoin de Selekā et que le cyclone Gita nous l’a volé. Nous avons besoin de reconstruire notre centre/atelier, pour reprendre le travail, et nous avons mis en place une cagnotte en ligne qui est mise en lien dans cet article avec plein de jolies photos, comme celle où nous sommes avec Sam Neill, l’acteur de Jurassic Park et de Hunt for the Wilderpeople quand il est venu nous rendre visite, parce que nous sommes pas seulement là pour les jeunes localement, nous sommes là pour tout le monde et ça commence à se savoir dans le Pacifique, où les artistes du cru bourlinguent d’atelier en atelier et d’expo en expo.
Si vous pensez que vous avez quelques sous à partager pour une bonne cause suite à une catastrophe naturelle d’échelle nationale, moi je dis : ça se passe ici ! Et bien sûr, les partages sur vos réseaux sociaux, ça ne coûte rien et ça peut nous aider énormément, merci d’avance à tous et à toutes pour vous soutien.”

 

 

Le cyclone Gita a dépouillé les jeunes et les artistes de Tonga de Selekā – et on a besoin d’aide pour reconstruire

https://www.youcaring.com/selekasiasitonga-1135454

 

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